France - Une lesbienne gagne le droit d'adopter
23.01.08
L'effet d'une bombe. C'est ce qu'a provoqué hier
l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), qui a
condamné la France à dédommager une homosexuelle qui s'était vu
refuser un agrément pour adopter un enfant.
Une première, susceptible de provoquer une très
vive controverse dans le pays. A dix voix contre sept, devant un
jury composé de17 membres de pays différents, la Cour a contraint
la France à verser 10'000 euros, au titre du préjudice moral, à
Emmanuelle B., une institutrice du Jura de 45 ans. Au moment de sa
demande d'agrément en 1998 auprès des services sociaux du
département, elle avait fait état de son homosexualité et de sa
vie en couple avec une psychologue. Hier, la CEDH a observé que
"le droit français autorise l'adoption pour un célibataire,
ouvrant ainsi la voie à l'adoption par une personne célibataire
homosexuelle" et noté que le Code civil reste muet "quant à la
nécessité d'un référent de l'autre sexe". Cette décision sans
précédent semble ouvrir la voie à l'adoption pour tous les couples
homosexuels. C'est en tout cas comme cela que veut l'interpréter
Éric Garnier, président de l'association des parents et futurs
parents gays et lesbiens : "Sans la légaliser, c'est quand même
une énorme victoire qui, au moins symboliquement, indique qu'on ne
pourra plus, en France, exclure les gens de l'adoption en fonction
de leur orientation sexuelle".
Les magistrats siégeant à Strasbourg ont
constaté que les autorités françaises ont, pour rejeter cette
demande d'agrément, "opéré une distinction dictée sur les
conditions tenant à son orientation sexuelle, distinction qu'on ne
saurait opérer d'après la Convention" européenne des droits de
l'Homme.
"Cette décision a une grande force morale,
assure l'avocate de la plaignante, Me Caroline Mécary. Non
seulement c'est une victoire de l'égalité sur la peur, le préjugé
et l'ignorance, mais en plus elle va obliger l'administration
française à ne plus pouvoir refuser un agrément en raison de
l'homosexualité d'un requérant".
A ce jour, neuf pays européens (Allemagne,
Belgique, Danemark, Espagne, Islande, Norvège, Pays-Bas,
Royaume-Uni et Suède) autorisent l'adoption d'enfants par des
homosexuels. Avec ce nouvel arrêt, nombre d'homosexuels devraient
désormais moins hésiter à confier leur homosexualité lors de leur
demande d'agrément. Mais, déjà, les choses auraient évolué à cet
égard, selon Me Mécary, qui affirme que "de plus en plus d'homos
s'en prévalent" aujourd'hui, "au moins à Paris et dans les grandes
villes".
Plusieurs associations familiales s'indignaient
hier du "scandale" et promettaient de continuer le combat contre
l'adoption homosexuelle.
Cet arrêt s'impose aux 47 pays membres du
Conseil de l'Europe, dont la Suisse depuis le 6 mai 1963.
Conséquences en Suisse
En Europe, c’est une première absolue. Qui aura bien sûr un impact
dans d’autres pays pour tous les célibataires homosexuels. Il
s’agit en effet du premier arrêt de principe de la juridiction
européenne en ce sens, souligne Robert Wintemutte, professeur de
droit au King’s College de Londres.
Pour Olivier Guillot, professeur de droit à
l'Université de Neuchâtel et spécialiste en droit de la famille,
il s'agit d'une "étape supplémentaire et un signe indéniable
d'évolution des mentalités". En Suisse, en ce qui concerne
l'adoption par des personne célibataires, les autorités restent
très restrictives. "Sur une moyenne de 600 adoptions par an,
seules une dizaine, voire une vingtaine, sont accordées à des
personnes célibataires. Les autorités doivent vérifier que
l'environnement familial permette un bon épanouissement de
l'enfant. Dorénavant, les tribunaux Suisses ne pourront plus
avancer cet argument de l'homosexualité pour refuser une adoption,
même si cela n'avait jamais été fait. En revanche, ils peuvent
avancer d'autres motifs, comme le manque de disponibilité du futur
parent par exemple. C'est une forme d'hypocrisie."
Selon le juriste, la véritable avancée pourrait
survenir le jour où un couple d'homosexuels ayant adopté à
l'étranger viendrait s'établir en Suisse. Si les parents faisaient
une demande de reconnaissance de décision auprès des tribunaux,
les juges devraient alors se prononcer. Et cela ouvrirait une
brèche quant à l'adoption par un couple homosexuel.
Swissgay.ch
Vidéos
"Twee vaders - Two fathers" : Terence, un jeune garçon
hollandais, chante une chanson à la gloire de Bas et Diederik,
"j'ai deux papas, deux vrais papas"... repris en choeur par
d'autres gosses.
Et cette pub de l'ILGA sur l'adoption :
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